Photographie de chiens de chasse enfermés dans un box grillagé avec, sur le dessus, un fusil de chasse et des animaux morts.
Table des matières

Modes de chasse et bien-être animal

Rapport à Monsieur Matthieu MEISSONNIER : mission chasse du Sénat sur chasse et bien-être animal

Modes de chasse et bien-être animal

Cet intitulé, à lui seul, révèle un oxymore.
L’acte de chasse est celui qui tend à la capture et à la mise à mort d’un animal vivant à l’état libre.
Dès lors, le bien-être et une mise à mort semblent peu compatibles.
Bien sûr, selon les modalités de cette mise à mort, la souffrance éprouvée par l’animal, être sensible, est différente.
La chasse à courre, le déterrage des blaireaux évoquent une charge de douleurs et de stress exceptionnelle par son ampleur.
Mais toute traque, toute balle ou plombs qui déchirent les chairs et broient les os occasionnent une souffrance intense à tout animal.

Le contexte sociologique :

Toutes les enquêtes d’opinion prouvent qu’une immense majorité de contemporains réprouvent la chasse loisir : 80% des Français souhaitent l’abolition de la chasse à courre ;
80% des Français souhaitent des dimanches sans chasse.
Ces données sociologiques ne sont pas contestables et se vérifient enquête après enquête.
Par ailleurs, la chasse loisir perd ses adeptes dont le nombre demeure « discret ».
Les dirigeants de la chasse clament volontiers recueillir des millions d’adeptes, tout en déplorant une réduction progressive qu’ils ne parviennent pas à enrayer.
Objectivement, on constate sur 40 ans une diminution de moitié du nombre des chasseurs que l’on peut estimer actuellement à environ 988.000, fourchette haute.
Mieux connu à l’échelon départemental, cette diminution de moitié se confirme.
En revanche, nos contemporains perçoivent deux données conduisant au rejet du loisir :

  • D’une part, l’animal, fut-il sauvage, n’est pas une chose, un objet, une machine, mais un être doté de sensibilité, être capable d’éprouver le principe du plaisir déplaisir ;
  • D’autre part, la biodiversité se meurt et si la chasse n’est pas la cause unique de cette mort du vivant, elle y participe. On ne saurait soigner une nature malade à coups de fusils.

Les données politiques :

Néanmoins, ces évolutions en profondeur de la société ne se traduisent pas par des adaptations de la règlementation du loisir.
Pas d’abolition de la chasse à courre, pas de dimanche sans chasse.
En France, 60 espèces d’oiseaux sont « chassables ».
En Europe, aucun pays n’autorise autant ces chasses : 34 espèces en Espagne, second pays en nombre d’espèces chassées, en moyenne 24 espèces chassables.
L’espace rural est confisqué par les chasseurs qui ne jouissent pas de droits légitimes mais de privilèges, créant pour les usagers pacifiques de la Nature un sentiment d’insécurité.
Trop d’hommes politiques font la danse du ventre devant les présidents de fédérations de chasseurs, exprimant leur soumission à ce lobby.
Il convient de s’étonner de ce décalage entre l’état des mentalités des citoyens et le poids d’un groupe de pression.
Historiquement, la discordance s’explique par la création de structures corporatistes héritées du gouvernement de VICHY.
Par ordonnance du 28 juin 1941 (JO du 30 juillet 1941) étaient créées les « sociétés départementales des chasseurs », devenues à la libération les fédérations départementales des chasseurs (arrêté du 15 novembre 1945).
Tout chasseur est tenu d’adhérer à cette structure unique dans chaque département, recette infaillible pour constituer un lobby.
La France de VICHY rêvait d’enserrer le pays dans des carcans corporatistes et elle a réussi concernant le loisir chasse qui impose ses exigences au pays contre la volonté démocratique des contemporains aspirant à un autre lien avec la faune.

Modes de chasse et évolution du loisir :

L’honnêteté intellectuelle, dont il convient de ne jamais se départir, commande que l’on dise clairement d’où l’on parle.
Je suis, avec 50% des contemporains, favorable à l’abolition de la chasse loisir considérant que nul ne doit occasionner souffrance et mauvais traitement à un être sensible sans une nécessité absolue.
La dignité humaine est à ce prix.
Ce n’est pas par atténuation de ce principe éthique premier que je constate que tout fait social appelle des évolutions.

Le nombre de chasseurs diminue année après année.
Le rejet de la chasse s’accroît et la prise de conscience est en marche.
Néanmoins, la société est ce qu’elle est.
Il faut procéder par étapes.

  • Abolir la chasse à courre car il est intolérable de poursuivre jusqu’à épuisement un animal pendant des heures, le soumettre aux morsures des chiens et l’achever à la dague ;
  • Abolir le déterrage des blaireaux, pratique d’une cruauté insondable ;
  • Réduire le nombre des espèces d’oiseaux soumises à la législation de la chasse en adoptant les mesures de protection appliquées partout ailleurs en Europe et en renonçant aux modes massifs et non sélectifs de destructions de populations d’oiseaux en mauvais état de conservation (filets pour les alouettes, lacets pour les grives).

Soulignons une ambiguïté manifeste : le lobby de la chasse invoque, devant l’opinion publique, la nécessité de « réguler » le « proliférant sanglier ».
Mais les chasseurs veulent que le sanglier prolifère car il constitue le fond de commerce de leurs stands de tir.
A l’heure où la petite faune a quasiment disparu, le sanglier occupe les dimanches des chasseurs en battues.

A ce stade, constatons que la situation demeure bloquée en ce pays.

Au parlement, des agents dociles du lobby relaient ses pires exigences, empêchant toute adaptation aux conditions d’un monde qui change tant dans les mentalités que dans le cadre matériel d’une Nature en voie d’extinction.
En l’état, la chasse française n’est pas réformable, adaptable, réconciliable avec ces exigences nouvelles.

En Bastille assiégée, elle campe sur ses privilèges, à l’abri de la servilité des hommes politiques.

Gérard CHAROLLOIS
Convention Vie et Nature

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