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Animalex défend le Loup à Annecy

Ce matin [2 octobre 2023], devant le tribunal correctionnel d’Annecy [Haute-Savoie] s’est tenu une audience rare puisque nous avons évoqué un dossier relatif à un loup.

Le prévenu, un homme d’une cinquantaine d’années, était poursuivi pour avoir tenté de percuter un loup gris avec son véhicule.

Ayant repéré l’animal lors d’un premier passage il a fait un détour pour faire en sorte de croiser à nouveau la route de l’animal.

Filmant la scène avec son téléphone portable, apercevant le loup arriver par la droite, sans ralentir, il déportait son véhicule sur la gauche pour tenter de percuter l’animal qui, fort heureusement, et parvenu à atteindre le champ voisin sans égratignure et a poursuivi sa route, sans se retourner.

Juste après que le loup ait échappé aux roues de son fourgon, on entend le prévenu lancer un « saloperie ».

Cet homme, décidément très intelligent, a ensuite envoyé la vidéo à plusieurs personnes de son entourage, pour l’essentiel des chasseurs.

Ses envois étaient accompagnés de commentaires divers : « loupé de peu » « ne pas transmettre ; les écolos n’aimeraient pas la tentative de meurtre »…

Manque de pot pour notre prix Nobel, l’un de ses amis n’a pas trouvé la vidéo très drôle et en a transmis une copie à l’office français de la biodiversité. Qu’il en soit remercié.

Il faut saluer l’action formidable menée par les agents de l’OFB, qui étaient d’ailleurs présents ce matin et dont le travail a été salué par chacun des intervenants.

Leur enquête a permis de retracer le parcours du prévenu, parcours qui ne laisse aucun doute sur les intentions qui étaient les siennes…

Le gros malin était présent et assisté par l’un de mes confrères ; un avocat d’expérience dont je me demandais au départ s’il se moquait de nous, les parties civiles, ou s’il était juste très très souriant. Je dois devenir parano parce que j’ai finalement compris que ce Confrère était juste jovial.

Sur le banc des parties civiles, quatre associations, dont Le Klan du Loup que je représentais.

L’audience à juge unique était assurée par une magistrate tandis que le ministère public était représenté par un procureur auquel j’avais déjà eu affaire dans le cadre d’un autre dossier juste avant l’été et dont je connaissais le sérieux et la détermination en matière de protection des animaux.

À la Barre, malgré l’évidence, le prévenu a tenté de nous faire gober l’histoire de l’homme-enfant émerveillé par les loups qui a fait un détour juste pour pouvoir filmer le loup et le montrer à ses enfants.

S’agissant du « saloperie » lancé juste après que le loup se soit faufilé devant son véhicule, il répétait, comme il l’avait dit aux agents de l’OFB, que ce mot était sorti sous l’effet de la peur d’abîmer sa voiture.

Le loup se serait jeté sous ses roues…. Je me suis permise, lorsqu’est venu mon tour de plaider, de rappeler que ce n’était pas le loup qui s’était précipité sous les roues du véhicule mais le véhicule qui s’était précipité sur le loup.

S’agissant des petits messages d’accompagnement des vidéos, là encore le prévenu avait une explication : « J’ai envoyé les vidéos à des chasseurs ; je me suis adapté ; c’était de l’humour« . (Tordant, en effet…)

Les plaidoiries des parties civiles ont été assez similaires, évoquant l’évolution de la population de loups en France ainsi que les actions de chacune des associations constituées.

J’ai pour ma part relevé un point qui avait échappé tant à l’OFB au Parquet mais qui me paraissait essentiel, à savoir que les faits ont été commis au sein le parc naturel régional du Massif des Bauges ; une réserve naturelle. ( Je n’ai pas vraiment de mérite puisque j’y habite…)

Or, le code de l’environnement en fait une circonstance aggravante, doublant la peine d’amende encourue.

Ainsi, non seulement le prévenu a tenté de détruire un animal d’espèce protégée mais, au surplus, il l’a fait sur un secteur ou l’animal était supposé évoluer dans la quiétude.

Le procureur a quant à lui rappelé que le loup est un animal protégé et que l’oeuvre de la justice sera de le rappeler autant de fois qu’il sera nécessaire, précisant que les chasseurs et les éleveurs devront apprendre à vivre avec cet animal.

Il a ensuite rappelé que le prévenu n’était ni chasseur ni éleveur mais que sa famille n’aimait pas le loup et qu’il avait quant à lui un avis partagé sur la question.

À l’argument du prévenu de l’absence d’intérêt de foncer sur le loup, un animal qui le fait rêver, le procureur répondait par le cas des requins : « Combien sont-ils à l’admirer et à vouloir le tuer, juste parce qu’ils en ont peur ? » mais « l’intérêt du prévenu était surtout de se faire mousser« .

Le procureur a requis une peine dissuasive « pour lui et pour qu’elle soit entendue » expliquant qu' »il faut rappeler à chacun le risque judiciaire qui pèse sur toute personne s’attaquant au loup« .

Il a requis une peine « éducative pour lui mais aussi pour les autres« , à savoir, une amende de 5000 €, le suivi d’un stage citoyen relatif aux atteintes à l’environnement, la publication de la décision dans deux journaux ainsi que la suspension pendant quatre mois de son permis de conduire.

Pour la défense, mon confrère a commencé sa plaidoirie par un rappel que le loup déchaîne les passions mais il a très vite estimé, à juste titre, que ce n’était pas le propos, tout en expliquant néanmoins que le loup est un tueur et qu’il est désormais présent dans les villes, évoquant Modane au sein de laquelle, il y a quelques mois, plusieurs loups arpentaient les rues… en mettant en danger les enfants (Heeeeuu…seulement ceux qui sont habillés en rouge et portent un panier de victuailles, non ?!).

Il a plaidé le fait que son client n’était pas un imbécile complet.

C’était une précision importante puisque, force est de constater que les faits ne le mettait nécessairement ce point en lumière …

Pour mon confrère, le risque pour le loup était nul parce que « le système anti collision n’a pas sonné« , donc pas d’éléments matériel et le mot « saloperie » prononcé (comme s’il s’agissait du seul élément à charge) ne prouve pas l’intention.

Il a donc plaidé la relaxe et le débouté des parties civiles.

Appelé à la barre en dernier, le prévenu a répété qu’il n’avait pas voulu faire de mal au loup.

Statuant sur le siège ( = sans se retirer pour discuter avec elle-même afin de prendre une décision à l’unanimité…????), la présidente a déclaré le prévenu coupable, estimant qu’il n’y avait aucune ambiguïté sur l’intentionnalité ni sur la matérialité des faits et a condamné notre zinzin du volant à suivre à ses frais le stage de citoyenneté requis par le ministère public, et, à défaut, à payer une amende de 3000 € soit un mois de son salaire.

Elle a également ordonné la publication à ses frais de la décision dans deux journaux locaux.

S’agissant des constitutions de partie civile des quatre associations, elles ont toutes été jugées recevables et chacune d’elles recevra 1000 € de dommage intérêts en réparation de son préjudice moral ainsi que des sommes allant de 850 à 1080 € en remboursement, total ou partiel, de leur frais de justice.

La présidente a souhaité favoriser les associations en ne prononçant qu’une peine d’amende avec sursis.

Cette décision est plutôt satisfaisante dans la mesure où elle a le mérite de montrer à chacun que la simple tentative de destruction d’un loup est susceptible de le conduire devant le tribunal correctionnel.

S’agissant de ce loup miraculé, souhaitons lui une longue et belle vie au sein du parc régional naturel des Bauges, un territoire que j’ai le bonheur de partager avec lui.

Source : Cabinet Animalex Avocats

Copie d'écran du site internet d'Animalex Avocat, représentant Maître Olivia Symniacos à côté d'une vache.
Maître Olivia Symniacos (capture d’écran du site ANIMALEX)

L’association Le Klan du Loup remercie Me Olivia Symniacos, du Cabinet Animalex Avocats à Annecy, pour son engagement dans la défense de la cause du Loup.

Les ennemis du Vivants devraient finir par comprendre que nous ne laissons rien passer afin que que Vive le Loup !

Commentaires sur l’article « Animalex défend le Loup à Annecy »

2 réponses

  1. un grand merci à l avocate comme a l’association, un peu de baume au cœur et un retour d estime pour un système judiciaire envers lequel je tendais à perdre confiance. je n’ai pas les mots pour exprimer ce que je ressens pour les loups (loups et chiens), j’ ignore la raison de cette passion, vois lire à l.instant est réellement un.moment de grande satisfaction

  2. Bonjour Anne Catherine,

    Merci pour votre commentaire. Nous l’avons également transmis à Me Olivia Symniacos.

    Si vous voulez participer à la défense du Loup, une place est libre au sein de notre association : la votre.

    Salutations lupines.

    Le KDL

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